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  • Photo du rédacteurCabinet St Pierre

Quels scénarios après Omicron ?

France — Lors d’une table ronde organisée au Sénat, les Prs Eric Caumes, Bruno Lina et l’épidémiologiste Vittoria Colizza ont présenté leurs visions de ce qui pourrait survenir après Omicron[1]. Progression vers une infection endémique ou développement de nouveaux variants inquiétants ? Tout en s’appuyant sur des données différentes, les trois interlocuteurs se sont montrés prudents mais plutôt rassurants.

La « grippe russe » et les enseignements de l’Histoire…

En préambule, le Pr Éric Caumes, infectiologue à l'hôpital de l'Hôtel-Dieu à Paris, a souligné « qu’il ne voyait pas dans une boule de cristal » mais que « sa boussole depuis le début de l’épidémie était historique ».

Il a rappelé qu’en 1889-1890, il y avait déjà eu une épidémie de coronavirus qui malheureusement avait été appelée à tort « la grippe russe ».

Le coronavirus à l’origine de cette épidémie et qui a fait plus de 500 morts par jour à l’époque à Paris, est le OC43, l’un des 4 coronavirus avec lequel nous vivons aujourd’hui en toute harmonie.

« Ce que l’on apprend sur cette épidémie d’OC43, c’est qu’il y a eu plusieurs vagues successives survenant l’hiver comme l’été. Les vagues sont devenues de plus en plus espacées, de moins en moins hautes et une immunité collective s’est faite et aujourd’hui on vit avec. Cette épidémie a duré 3 à 5 ans et c’est pour cela que j’ai dit que celle-ci durerait 3 à 5 ans ».


La « deuxième boussole » de l’infectiologue s’appuie sur un autre grand principe de l’infectiologie qui est que lorsqu’un virus mute, lorsqu’il gagne en transmissibilité, il perd en pathogénicité, ce qui est observé avec Omicron.

« Je pense que cela va aller en s’atténuant, avec des épidémies hivernales, mais que cela va finir par s’installer comme les 4 autres coronavirus l’ont fait avant. Après, on peut toujours faire des scénarios catastrophes, mais je ne verse pas dans ce catastrophisme. Je dois reconnaitre que la vérité est qu’on n’en sait rien, mais l’histoire des épidémies et des maladies infectieuses nous enseigne une vision optimiste des choses pour le moyen terme ou le long terme », a conclu le Pr Caumes.

L’histoire des épidémies et des maladies infectieuses nous enseigne une vision optimiste des choses pour le moyen terme ou le long terme. Pr Eric Caumes


Quid des mutations ?

Le Pr Bruno Lina, chef de service à l’Institut des agents infectieux du Centre hospitalier universitaire de Lyon et membre du Conseil scientifique Covid-19, a pour sa part livré une analyse et une perspective sur l’évolution des virus avec une focale très virologique.

Selon lui, les deux hypothèses les plus probables à court terme sont :

  • une évolution par dérive moléculaire et antigénique depuis BA.1/Omicron (par exemple BA.2) ;

  • une coévolution : à la fois une dérive moléculaire/antigénique depuis Omicron et des modifications dans d’autres gènes qui confèreraient une meilleure capacité de transmission et d’infection (dite fitness) ;

Moins probable, le développement d’un nouveau variant avec une meilleure capacité de transmission et d’infection venant de la racine (les premiers virus en Chine). « On ne peut pas dire que ce risque n’existe pas, mais ce n’est pas le plus probable », a souligné l’infectiologue.

Toutefois, il faut garder en tête comme possibles deux autres hypothèses problématiques :

  • une recombinaison génétique entre le SARS-CoV-2 et un beta-coronavirus humain (comme OC43). Cela pourrait modifier la pathogénèse et il faut donc surveiller l’évolution du virus en effectuant des séquençages ;

  • une rétro-zoonose à partir d’animaux d’élevages (cas des hamsters dorés à Hong Kong, des visons en Europe, des cervidés en Amérique du Nord, des animaux de compagnie et de zoo infectés…). « Lorsque le virus retourne de l’humain vers l’animal, il reprend une capacité évolutive sur lequel il faut être extrêmement vigilant. Si ce virus retourne vers l’homme, cela peut faire une nouvelle racine comme celle qui avait émergé en 2019 », précise le Pr Lina.

Lorsque le virus retourne de l’humain vers l’animal, il reprend une capacité évolutive sur lequel il faut être extrêmement vigilant. Si ce virus retourne vers l’homme, cela peut faire une nouvelle racine comme celle qui avait émergé en 2019. Pr Bruno Lina.


La vision de l’épidémiologiste

A court terme, Vittoria Colizza, épidémiologiste, directrice de recherche à l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm / Médecine Sorbonne Université), ne peut que constater la décrue rapide d’Omicron, une décrue qui pourrait s’accélérer avec les vacances scolaires et l’arrivée du Printemps.

Elle met toutefois en garde contre la présence du variant BA.2 qui semble se propager plus vite, sans que l’on sache encore s’il a une faculté de transmission augmentée et/ou une capacité accrue de réinfection. Aussi, ce variant pourrait échapper un peu plus à l’immunité acquise contre les variants précédents (Delta, Alpha…), selon les premières données disponibles.

Pour le plus long terme, d’après Vittoria Colizza, deux scenarii sont plus plausibles. Le premier est l’émergence de nouveaux variants. « Nous avons quand même, dans le reste du monde, une incidence qui reste très élevée. Or, l’incidence élevée signifie qu’il y a des probabilités plus élevées d’avoir des mutations qui pourraient devenir dominantes ».

L’autre scénario est l’endémicité, comme pour ce que l’on observe avec la grippe ou d’autres maladies communes. « Un scénario probable est qu’une fois qu’on accumule un certain nombre de couches d’immunité [naturelle ou acquise], ses couches vont protéger de façon assez large la population ». Mais, on ne sait pas combien de temps il faudra pour y arriver. « Il ne faut pas s’imaginer que ce sera un 100-mètres sur une piste d’athlétisme très bien éclairée, mais plutôt une course de trail avec plusieurs obstacles sur le chemin et un certain nombre possible de résurgences épidémiques », précise-t-elle avant d’insister sur la notion d’anticipation des vagues.

On s’attend à une saisonnalité des virus qui permettra de planifier des campagnes de vaccination. Pr Bruno Lina


« Aujourd’hui, les campagnes de vaccination ont toujours couru après les variants. Maintenant, on s’attend à une saisonnalité des virus qui permettra de planifier des campagnes de vaccination. Il faudra anticiper », conclut l’épidémiologiste.

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